🌎 Guerre commerciale : qu'en pense Howard Marks ?
#45 : Celui qui n'en était pas à sa première crise mais qui ne savait rien
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💭 Mon grain de sel : Howard Marks a encore frappé
Le 9 avril dernier, Howard Marks a publié un nouveau Memo, intitulé ‘Nobody knows (yet again)’ - en français ‘Personne ne sait (encore une fois)’.
Howard Marks est un des “super)investisseurs” américain, cofondateur et coprésident d'Oaktree Capital Management, une société de gestion d'investissements spécialisée dans les investissements alternatifs. Marks est réputé pour ses mémos qu’il publie depuis 1990, où il met souvent l'accent sur l'importance de la gestion du risque, de la pensée contrariante et de l'investissement dans la valeur.
J’ai déjà évoqué Marks dans cette newsletter, par exemple en janvier dernier :
Voici donc un résumé des points principaux de son Memo, disponible en anglais ici, en français ici (attention il y a quelques approximations dans la traduction), et en audio ici !
Le memo commence avec un flashback en 2008, lors de la crise des sub-primes. Marks rappelle qu’à l’époque il avait déjà publié un Memo avec le même titre (‘Personne ne sait’). En pleine crise, PERSONNE ne savait si la crise allait s’arrêter, ni quand. Il admet son ignorance et partage ses conclusions face à cela :
Personne ne pouvait dire qu'il "savait", y compris moi. Je me suis contenté de tirer mes conclusions, qui étaient les suivantes :
nous ne pouvons pas prédire avec certitude la fin du monde,
nous n'aurions aucune idée de ce qu'il faudrait faire si nous savions que la fin du monde allait arriver,
les choses que nous ferions pour nous préparer à la fin du monde seraient désastreuses si elle n'avait pas lieu, et
la plupart du temps, la fin du monde ne se produit pas.
En d’autres termes : tout ce qu’il pouvait faire, c’est allouer son capital dans des actifs de qualité, à des prix incroyablement bas. Son raisonnement peut se résumer ainsi je pense :
Si la fin du monde a lieu : peu importe ce que je fais, j’aurai peu de chances de m’en sortir
Si la fin du monde n’a pas lieu : j’aurai accumuler des actifs de qualité à faible coût, qui devraient logiquement prendre de la valeur à long-terme
Marks insiste cependant sur une chose : il ne CONNAIT PAS l’avenir, et ni lui ni personne ne peut “analyser l’avenir”.
Je tiens à dire ici, à propos de 2008 et des autres crises que j'ai traversées, ainsi qu'aujourd'hui, que je ne tire pas mes conclusions avec confiance et que je n'agis pas sans appréhension. La certitude n'a absolument pas sa place dans le monde de l'investissement, et c'est particulièrement vrai aux tournants et pendant les bouleversements. Je ne suis jamais sûr que mes réponses soient bonnes, mais si je peux raisonner sur ce qui est le plus logique, je considère que je dois suivre cette voie.
Les perspectives incertaines
Howard Marks présente ensuite un concept important : faire des prévisions est une chose, mais il est crucial d’estimer la probabilité qu’une prévision se réalise (ou non). Et que, dans le contexte macro-économique actuel, faire des prévisions “correctes” est encore plus difficile que d’habitude.
L’un des points sur lesquels j’insiste, c’est que même pour quelqu’un qui anticipe l’avenir à travers des prévisions, une prévision seule ne suffit pas. En plus d’une prévision, il faut aussi avoir une bonne idée de la probabilité qu’elle soit correcte, car toutes les prévisions ne se valent pas. Dans ce cas précis, compte tenu des circonstances, il faut accepter que les prévisions ont encore moins de chances que d’habitude de s’avérer justes.
Il en vient à l’un de passages qui m’a le plus marqué en lisant son Memo : si nous attendons d’avoir suffisamment confiance, suffisamment de certitudes, avant d’investir, nous serons comme “paralysés” par la peur de mal faire. Et inversement : agir en pensant avoir pleinement confiance a de grandes chances d’être une erreur.
Nous devons prendre nos décisions en dépit de l’absence de certitudes et de confiance.
Mais il faut aussi garder à l’esprit que décider de ne pas agir n’est pas l’opposé d’agir ; c’est une action en soi. La décision de ne rien faire – de laisser un portefeuille inchangé – doit être examinée avec autant d’esprit critique qu’une décision de le modifier.
Les vieilles rengaines dans lesquelles se réfugient les investisseurs terrifiés – comme « nous n’allons pas essayer d’attraper un couteau qui tombe » ou « attendons que la poussière retombe et que l’incertitude se dissipe » – ne peuvent, à elles seules, dicter notre comportement.
J’adore le titre d’un livre écrit par un analyste des marchés nommé Walter Deemer : « When the Time Comes to Buy, You Won’t Want To » (Quand viendra le moment d’acheter, vous n’en aurez pas envie).
Les événements négatifs qui provoquent les plus fortes chutes de prix sont effrayants, et ils découragent l’achat. Mais lorsque les mauvaises nouvelles pleuvent, c’est souvent le meilleur moment pour se positionner.
Les droits de douane
Marks discute ensuite des fameux droits de douanes, chers au coeur de Donald Trump. Les objectifs annoncés par le président sont (trop ?) nombreux :
soutenir l’industrie manufacturière américaine
encourager les exportations
décourager les importations
réduire ou éliminer le déficit commercial
sécuriser les chaînes d’approvisionnement grâce à la relocalisation
dissuader les pratiques commerciales déloyales à l’encontre des États-Unis
forcer d’autres pays à venir négocier
générer des revenus pour le Trésor américain
Même si - du point de vue des US - ces choses-là sont fondamentalement souhaitables, Marks rappelle une banalité que certains économistes oublient parfois : l’économie n’est PAS une science exacte.

Le problème, c’est que dans le monde réel – et en particulier en économie – il existe des conséquences de second et de troisième ordre qu’il faut prendre en compte. S’il n’y en avait pas, l’économie serait aussi fiable que les sciences physiques, selon le principe : « si vous faites A, alors B se produit. »
Comme l’a dit le physicien théoricien Richard Feynman : « Imaginez à quel point la physique serait plus compliquée si les électrons avaient des sentiments. »
Eh bien, les économies et les marchés sont presque entièrement composés de personnes… et les personnes, elles, ont des sentiments, ce qui rend leurs réactions imprévisibles.
Parmi les conséquences à la hausse des droits de douanes, Marks cite par exemple des représailles de la part d’autres pays (comme c’est le cas actuellement avec la Chine).
L’une des conséquences les plus directes et a priori impossible à éviter est la hausse des prix. C’est le cas à la fois pour les produits importés aux US directement de l’étranger, mais aussi pour les produits directement construits aux US, puisque les taxes s’appliquent également sur les matières premières nécessaires à la production, dans la plupart des cas. Et pour faire face à ces hausses de taxes, une entreprise n’a que deux solutions :
encaisser la charge elle-même, et donc perdre des marges
faire encaisser la charge par le client, et donc augmenter le prix en conséquence

Howard Marks met ensuite en avant 4 points qui permettent de comprendre pourquoi les objectifs que Trump souhaite atteindre avec ses tariffs sont non seulement difficiles à atteindre, mais probablement aussi contre-productifs :
Il n’y a pas assez d’usines actuellement. Il n’existe peut-être même pas une seule usine aux US capable de produire des écrans plats…
Construire de nouvelles usines est long et incertain. Non seulement la construction d’une usine nécessite des permis et du temps pour ‘sortir de terre’ ; mais en plus, cela nécessite d’importants investissements, qui pourraient mettre longtemps avant d’être rentable.
Les PDG sont-ils susceptibles de s'engager dans ces investissements en se basant sur des tarifs qui pourraient être soumis à une renégociation (ou à une suspension lors de l'arrivée d'une nouvelle administration) ?
Il n’y a pas assez de travailleurs compétents aux US pour remplacer les ouvriers en Chine et partout dans le monde d’où viennent les produits importés.
Les Américains ont importés des produits car ils étaient tout simplement moins cher. Les produits fabriqués à l’étranger coûtent souvent moins cher que les mêmes produits s’ils étaient fabriqués aux US.
Pourquoi les États-Unis ont-ils perdu les emplois qu’ils ont perdus ? Parce que les travailleurs américains étaient mieux payés que les travailleurs d’autres pays pour le même travail, sans que les produits américains soient suffisamment bons pour justifier des prix de vente plus élevés.
C’est pour cela que les États-Unis sont passés de l’importation de 330 Volkswagen en 1950 à plus de 400 000 en 2012. Ce n’est pas parce que les droits de douane américains étaient trop bas. La vérité est simple : les produits étrangers coûtent souvent moins cher que les produits comparables fabriqués aux États-Unis.
Même si, à l’avenir, les droits de douane sont fixés à un niveau suffisamment élevé pour que les produits fabriqués aux États-Unis deviennent moins chers que les importations avec tarifs inclus, les prix seront, en valeur absolue, plus élevés que ce à quoi les Américains sont habitués.
Et si les Américains veulent consommer “100 % US” : les prix des biens seront très certainement plus cher, laissant au consommateur le choix entre : payer plus cher le même produit, ou payer le même prix pour un produit de moindre qualité…
Marks met également en avant un constat trop peu souvent partagé : pour un emploi local “sauvé”, combien de personnes verront leur pouvoir d’achat et qualité de vie diminués ?
Comment les intérêts des 3,2 millions d’Américains qui auraient perdu leur emploi dans l’industrie manufacturière à cause de la Chine seront-ils équilibrés avec ceux des centaines de millions de personnes qui devraient payer beaucoup plus cher leurs produits importés ? Ce n’est pas une question facile.
La situation internationale
Dans la dernière section, Marks évoque le fait que depuis la fin de la seconde guerre mondiale, “La mondialisation a contribué à une marée économique montante qui a réellement fait monter tous les bateaux.”
Chaque pays est en général capable de produire certaines choses mieux (ou moins cher) que les autres pays. Marks illustre ça avec un exemple amusant :
Nous sommes tous gagnants parce que l’Italie fabrique les pâtes et la Suisse les montres. Mais si des barrières commerciales forçaient l’Italie à produire ses propres montres et la Suisse à fabriquer ses propres pâtes, les citoyens des deux pays finiraient probablement par payer plus cher des produits qu’ils achetaient auparavant à moindre coût à l’étranger, ou consommer des produits de moindre qualité fabriqués localement — voire les deux.
Les citoyens américains, en particulier, ont énormément profité du fait que la plupart des biens peuvent être produits à moindre coût dans d’autres pays — et surtout dans les pays en développement — en raison de salaires plus bas. Cela a certes coûté quelques millions d’emplois aux États-Unis, mais cela a aussi permis à pratiquement tous les Américains de vivre bien mieux que s’ils avaient été limités à l’achat de produits fabriqués uniquement aux États-Unis. C’est la raison simple pour laquelle la majorité des articles non alimentaires vendus chez Walmart sont importés.
Après avoir rappelé que les US ont énormément donné au reste du monde après la seconde guerre mondiale (ce qui a contribué indirectement à faire des US l’une des nations les plus prospères au cours du 20e siècle), Marks appelle à la prudence et avertit des risques associés à voir les États-Unis isolationnistes :
Il est tout à fait possible que nous puissions inverser ce processus :
Nous pouvons provoquer nos partenaires commerciaux et donner à nos alliés le sentiment d’être intimidés et extorqués.
Nous pouvons pousser des pays qui comptaient sur nous pour le capital et d’autres formes d’aide à se tourner plutôt vers la Chine et la Russie.
Nous pouvons convaincre le reste du monde d’investir moins aux États-Unis et de réduire leurs achats de bons du Trésor américain.
Les deux premiers points pourraient nous faire perdre des alliés importants et inciter certaines nations à porter un regard moins favorable sur la démocratie. Comme le dit mon ami Michael Smith : « On ne peut pas à la fois provoquer et influencer. » Quant au troisième point, il aurait un impact considérable sur la situation budgétaire des États-Unis.
Marks rappelle aussi que jusqu’à présent, les US ont bénéficié d’une “carte de crédit infinie” :
Cela a permis aux États-Unis d’enregistrer des déficits budgétaires au cours de chacune des 25 dernières années, et de toutes sauf quatre des 45 dernières, y compris des déficits dépassant les mille milliards de dollars chaque année depuis cinq ans. En d’autres termes, nous avons pu vivre au-dessus de nos moyens, le gouvernement fédéral dépensant plus qu’il ne perçoit en impôts et en taxes.
Il décrit donc les risques à venir si le reste du monde n’offrait plus autant de “libertés” à la dette américaine…
Je veux aussi partager l’extrait ci-dessous, à propos de la perte de leadership ds US face au Japon dans le secteur automobile dans les années 1980. La phrase en gras illustre bien selon moi la complexité des choses lorsqu’on tente d’analyser les “gains” ou les “pertes” face à un marché mondialisé…
Dans les années 1980, des personnes comme [le conseiller de Trump pour le commerce et l’industrie] Peter Navarro ont estimé que le fait que le Japon prenne de l’avance sur les États-Unis dans le secteur automobile menaçait l’avenir du pays.
Et en effet, le Japon a pris de l’avance — et ne s’est jamais retourné.
Mais depuis, l’économie américaine a plus que doublé de taille par rapport à celle du Japon. Elle a doublé même en tenant compte des évolutions démographiques et de la force des monnaies. Elle a doublé malgré la perte de leadership dans l’automobile — ou bien est-ce qu’elle a doublé grâce à cette perte, en partie ? Les marges sur les logiciels ou les moteurs d’avion sont probablement bien plus élevées que celles des voitures grand public.
En résumé
Marks termine son Memo de façon assez critique sur les gouvernements et leur gestion des finances. En particulier, les tariffs de Trump sont d’après lui “un but contre son camp”.
Comme je le demandais dans un Memo en septembre : est-ce vraiment une bonne idée que les gouvernements tentent de contourner les lois de l’économie dans le but de faire en sorte que leurs économies — qui, laissées à elles-mêmes, suivraient leur propre trajectoire naturelle — répondent à des préférences politiques ?
Un tarif douanier est une « externalité » ou une « artificialité » conçue pour (a) décourager des exportations qui auraient autrement eu lieu et ainsi (b) aider des entreprises nationales à réaliser des ventes qu’elles n’auraient pas pu faire si elles avaient dû fonctionner sans intervention.
Mais quel sera le coût de cette intervention ? Et qui en paiera le prix ?
Pour finir, Howard Marks recycle la conclusion d’un Memo datant de la crise de 2008, et qui résume bien également ma façon d’aborder les choses :
Tout le monde était heureux d'acheter il y a 18-24-36 mois, lorsque l’horizon était dégagé et que les prix des actifs étaient au plus haut. Maintenant, avec des risques jusqu’alors inimaginables sur la table et intégrés dans les prix, il est approprié de chercher des bonnes affaires : les opportunités négligées, les « bébés jetés avec l'eau du bain ». Nous sommes sur le coup.
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Il y a une grande différence entre probabilité et résultat. Des événements probables ne se produisent pas, tandis que des événements improbables se produisent, tout le temps. C'est l'une des choses les plus importantes à savoir sur le risque d'investissement.
Howard Marks - The Most Important Thing: Uncommon Sense for the Thoughtful Investor
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